Brésil
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L’accès aux technologies de l’information et de la communication (TIC) au Brésil a progressé régulièrement ces dernières années à quelques exceptions importantes près. L’accès à l’équipement médiatique traditionnel comme la radio et la télévision est devenu presque universel, bien que la présence des radios dans les foyers brésiliens semble diminuer. Il s’agit maintenant de passer à la radio et à la télévision numériques et la principale question sur le plan réglementaire est la définition de la norme. Parallèlement, l’accès aux ordinateurs et à l’internet continue d’être au centre de la politique publique des TIC du pays.
Le Comité directeur sur l’internet brésilien (CGI) surveille l’utilisation des TIC depuis trois ans (2005-2007) et est actuellement la principale source de données sur l’accès aux TIC (CGI, 2008). D’autres données proviennent d’un sondage national sur les ménages réalisé par l’Institut brésilien de géographie et de statistiques (IBGE), dont les données les plus récentes datent de 2006 (IBGE, 2007). Ce seront les principales sources utilisées pour ce rapport sur l’accès aux TIC au Brésil.
Les principaux indicateurs démographiques, économiques et sociaux du pays sont présentés dans le tableau 1.
Tableau 1 : Principaux indicateurs démographiques, économiques et sociaux | |
Population (2007) |
183,987,291 |
Produit intérieur brut (PIB) par habitant par parité du pouvoir d’achat (2005) |
USD 8,402 |
Index Gini (2005) |
0.57 |
Indice du développement humain (2005) |
0.800 |
Taux d’alphabétisation des adultes (2005) |
88.6% |
Population de 18 à 24 ans suivant des études supérieures (2006) |
12.1% |
Après une vive controverse, le Brésil a opté en 2007 pour la norme japonaise SIDB pour la télévision numérique. La décision a été vivement critiquée par la société civile et les universitaires en raison de la faiblesse de la norme interactive et du fait qu’elle ne permet pas une plus grande pluralité de radiodiffuseurs. En fait, la mise en œuvre de la norme a été réalisée de telle façon que les compagnies qui détenaient une licence pour le spectre de télévision analogique ont automatiquement conservé le droit de fournir les nouveaux services de télévision numérique. Un différend semblable est en cours concernant l’adoption de la norme de la radio numérique et les membres de la société civile qui plaident pour une plus grande pluralité s’opposent à nouveau à la norme proposée par le gouvernement, IBOC.
L’idée défendue par les compagnies de télévision visant à imposer des mesures de protection technique (MPT) sur la télévision numérique pour limiter l’enregistrement du contenu diffusé est également controversée. L’adoption des MPT pour limiter les copies de télévision numérique fait actuellement l’objet d’un débat au Congrès. Il s’agit de limiter les copies de contenu diffusé à une copie de bonne qualité par appareil de télévision (projet de loi 6915/2006). Un autre projet de loi débattu (projet de loi 89/2003) propose de criminaliser le contournement des MPT.
Un dernier point de controverse en matière de télévision numérique est de savoir quoi faire du spectre utilisé pour la diffusion analogique une fois que le système sera complètement converti au numérique. Les organisations de la société civile proposent que cette partie du spectre devienne commune – un spectre ouvert utilisé pour les réseaux citoyens (Silveira et autres, 2007). Les compagnies de télévision pour leur part veulent conserver le droit d’utiliser le spectre pour de nouveaux services.
Beaucoup plus impressionnant que la diminution relative des radios analogiques dans les foyers est la forte baisse du nombre de téléphones fixes (de 54 à 45 % depuis trois ans), qui s’explique en partie par l’augmentation considérable du nombre de téléphones mobiles, soit de 61 à 74 %. Ce sont les téléphones mobiles qui connaissent la croissance la plus forte dans les foyers, en particulier chez les pauvres. Le sondage de la CGI révèle que 49 % des foyers les plus pauvres (avec un revenu familial mensuel de moins de 240 dollars) ont déjà accès à des appareils mobiles et 73 % des ces appareils peuvent être connectés à l’internet (bien que seulement 3 % le soient). En revanche, seulement 17 % des foyers les plus pauvres ont des lignes fixes. Les possibilités d’accès aux services internet sur les appareils mobiles devraient donc encourager l’adoption d’une politique sur l’extension de l’accès internet.
Un aspect important de la réglementation est la concentration des opérateurs de télécoms. Un débat fait rage depuis début 2008 sur la question de savoir si les autorités brésiliennes devraient permettre la fusion des opérateurs de télécom Oi et Brasil Telecom. D’une part, la fusion est critiquée par certains analystes car elle utilise les fonds publics et concentre le marché des télécoms. Mais selon les défenseurs de la fusion, cela empêchera les deux petites compagnies brésiliennes d’être achetées par les opérateurs les plus importants d’Amérique latine, la compagnie espagnole Telefónica et la compagnie mexicaine TelMex. Certains avancent également que la nouvelle compagnie fusionnée aura une large part de capital public, si bien que l’État aura un plus grand pouvoir d’intervention si le marché devenait dysfonctionnel. Il incombe au régulateur Anatel de redéfinir les règles qui permettront la fusion ou la bloqueront.
Bien évidemment, l’accès aux ordinateurs et à l’internet est au centre de la récente politique publique sur les TIC. Celle-ci comprend l’offre de subventions pour l’achat d’ordinateurs de bureau et d’ordinateurs portables et pour assurer l’accès public à l’internet.
There are two main policies for subsidising the acquisition of computers, both implemented at the federal level: the programme Computers for All and the complementary tax incentive law calledLei do Bem, and the programme One Computer per Student.
Depuis 2004, le programme Ordinateur pour tous[1]accorde des exemptions fiscales aux entreprises et un crédit à faible intérêt aux consommateurs pour qu’ils puissent acheter des ordinateurs de bureau et des ordinateurs portables bon marché contenant des logiciels libres.[2]Le programme visait la vente d’un million d’ordinateurs par an, mais les données indiquent qu’il n’a pas atteint cet objectif ambitieux. En 2006, Ordinateur pour tous était responsable de la vente de 530 000 ordinateurs. Pourtant, 1,5 million d’ordinateurs supplémentaires contenant des logiciels libres, mais sans lien avec le programme, ont également été vendus en 2006. En 2005, le programme a été complété par une loi de stimulation fiscale (Lei do Bem) qui avait notamment pour but de subventionner l’acquisition d’ordinateurs haut de gamme avec ou sans logiciels libres. Toutes ces initiatives ont été en grande partie responsables de la vente de plus de 10 millions d’ordinateurs au Brésil en 2007. Le Brésil devient ainsi le cinquième plus grand marché du monde pour les ordinateurs personnels.
Le programme Un ordinateur par élève en est encore au stade de la planification. Inspiré au départ par le projet Un ordinateur portable par enfant de Nicholas Negroponte, le programme a pour but l’achat d’ordinateurs portables pour chaque élève du pays. Pendant l’étape expérimentale dans quelques écoles, les premières tentatives de mise en œuvre du programme ont été avortées en 2007 étant donné que les soumissions pour l’achat des ordinateurs dans le cadre d’un appel d’offres public ne correspondaient pas au budget du gouvernement.
Concernant l’accès à l’internet, les politiques publiques se sont concentrées sur le comblement d’un écart clairement observé dans les sondages. Alors que 17 % des Brésiliens ont une connexion internet chez eux, plus du double (34 % de la population) ont accédé à l’internet au moins une fois au cours des trois mois précédant le sondage CGI. Par conséquent, 17 % de la population ont eu accès à l’internet ailleurs qu’à leur domicile : au travail, à l’école ou dans des centres d’accès publics ou privés. Parmi les pauvres, le sondage a révélé que la plupart avaient accès dans des endroits privés, comme les centres sur réseau local et les cybercafés.[3]Quant aux Brésiliens les plus pauvres (revenu familial inférieur à 240 dollars), 78 % des connexions internet se font dans ces endroits commerciaux.
Ces chiffres révèlent le besoin urgent d’adopter des politiques qui assurent un accès libre et public à l’internet. Il existe plusieurs programmes aux niveaux municipal, fédéral et d’État pour essayer d’offrir un accès internet gratuit à la population. Mais comme les données le montrent, ces initiatives sont insuffisantes et mal coordonnées. Parmi plusieurs programmes actuels, quatre ressortent : le programme GESAC, coordonné par le Ministère des communications, le programme Points d’accès culturels du Ministère de la culture, le programme Télécentres dans la municipalité de São Paulo et le programme Haut débit à l’école annoncé récemment.
Le GESAC (gouvernement électronique – service de soutien aux utilisateurs)[4]vise à offrir un accès internet par satellite là où l’indice de développement humain est faible, grâce à des centres d’accès internet. Les dernières données disponibles montrent qu’actuellement, il existe 3 482 centres d’accès internet GESAC offrant plus de 22 000 terminaux équipés de logiciels libres dans 2 145 municipalités.
Le programme Points d’accès culturel[5]est quelque peu différent. Outre l’accès internet, il offre un équipement multimédia aux groupes culturels pour produire, enregistrer numériquement et partager des contenus en utilisant surtout des logiciels libres. Pour le moment, il existe 781 points d’accès sans fil dans le pays.
Les télécentres[6]offrent l’accès internet à São Paulo en utilisant là encore les logiciels libres. C’est le plus important programme municipal du Brésil puisqu’il offre l’accès internet dans 273 centres comptant 5 400 terminaux et 1 362 984 utilisateurs inscrits. Les programmes comme GESAC, Points d’accès culturels et Télécentres essaient de compenser le manque d’accès internet dans les foyers, mais ils ne semblent pas correspondre à la demande. Alors que 78 % des plus pauvres utilisant l’internet paient leur accès dans des endroits comme les cybercafés, seulement 8 % y accèdent dans des centres publics.
Pour relever ce défi considérable, le gouvernement fédéral a récemment annoncé le nouveau programme Haut débit à l’école. Ce programme prévoit d’installer une infrastructure internet large bande dans toutes les écoles publiques d’ici décembre 2010 offrant ainsi l’accès internet à la plupart des jeunes scolarisés. Le programme est le résultat d’une entente entre le gouvernement fédéral et les compagnies de téléphone selon laquelle le gouvernement remplace l’exigence contractuelle voulant que les compagnies téléphoniques construisent des points de service dans chaque ville par l’obligation de construire une infrastructure large bande dans tout le pays et d’offrir l’accès gratuit dans toutes les écoles jusqu’à 2025. Selon le gouvernement fédéral, 55 000 écoles publiques recevront la connectivité internet large bande, qui sera ensuite offerte aux 35 millions d’élèves et d’enseignants.
Les critiques du programme opposent deux arguments : avec ce programme, le projet de construction d’une infrastructure large bande publique a été abandonné, et l’infrastructure large bande étant contrôlée par le secteur privé, les compagnies de téléphone n’auront aucune concurrence pour exploiter les services large bande commerciaux dans les régions éloignées (Gindre, 2008). Finalement, il serait possible d’étendre l’accès internet en utilisant le fonds FUST – un fonds composé de 1 % des revenus des entreprises de télécoms perçus pour offrir l’accès universel aux services de télécommunication. En raison de lois divergentes et de l’utilisation des ressources du fonds pour payer la dette publique, le fonds à peine a été utilisé depuis 2002.
Ce bref aperçu de la situation de l’accès aux TIC au Brésil et des politiques d’accès universel, pourrait contribuer à définir quelques mesures prioritaires :
- Les MPT limitant l’enregistrement des contenus télévisuels numériques et la criminalisation du contournement des MPT seront bientôt votés au Congrès. Parallèlement, la norme de radio numérique susceptible ou non de multiplier ou non le nombre des radiodiffuseurs sera bientôt définie par le Ministère des communications. Ces mesures exigent des interventions progressives.
- Le spectre utilisé actuellement par la télévision analogique sera vacant et pourrait servir à construire des réseaux citoyens sur un spectre ouvert.
- Les politiques sur les centres d’accès internet publics ont échoué. Les Brésiliens les plus pauvres paient pour l’accès internet dans les cybercafés et n’utilisent pas suffisamment les centres publics. Le fonds FUST pourrait servir à améliorer sensiblement la portée des politiques d’accès public.
ABES/Ipsos,Computador para Todos-2006, 2006. Voir à :
www.abes.org.br/computadorparatodos.pdf
CGI (Comité directeur de l’internet du Brésil),Survey on the Use of Information and Communication Technologies in Brazil,São Paulo, Brazilian Network Information Centre, 2008. Voir à:www.cetic.br/tic/2007/indicadores-cgibr-2007.pdf
GESAC (Gouvernementélectronique – Service de soutien aux utilisateurs) :www.idbrasil.gov.br
Gindre, G., Governo troca política de inclusão ampla por banda larga nas escolas.Observatório do Direito à Comunicação,2008. Voir à:Observatório do Direito à Comunicação.
IBGE (Instituto Brasileiro de Geografia e Estatística), Pesquisa Nacional por Amostra de Domicílios: Síntese de indicadores 2006, Rio de Janeiro, IBGE, 2007. Voir à: Síntese de indicadores 2006
Silveira, S. A. et autres,Comunicação digital e a construção dos commons: Redes virais, espectro aberto e as novas possibilidades de regulação,São Paulo, Fondation Perseu Abramo, 2007.
Télécentres:www.telecentros.sp.gov.br
[2]Le programme exigeait que les ordinateurs soient vendus uniquement avec des logiciels libres, mais un sondage auprès des acheteurs a montré que 73 % étaient passés à Windows après la vente (ABES/Ipsos, 2006).
[3]LAN (local area network) houses are essentially cybercafés devoted primarily to internet gaming.